Du Choc des Titans à Dune, une cinquantaine de remakes s’apprêtent à déferler sur les écrans. Le phénomène n’est pas nouveau. Les plus grands, tels Hitchcock et Hawks, s’y sont essayés, et aujourd’hui les frères Coen ou Michel Gondry prennent la relève. Inventaire d’un véritable genre en soi.
La grande mode des remakes au cinéma
Récemment c’était Fame, L’Attaque du métro 123 et Brothers. Aujourd’hui Wolfman et Le Choc des Titans et, bientôt, Robin des bois, L’Aube rouge, Tron l’héritage, Karaté Kid. Et puis, plus tard, Dracula, Le Sauvage, Nikita, Capitaine Blood. Quelques titres… parmi une cinquantaine annoncée. Leurs points communs : tous sont des remakes. Et certains laissent dubitatifs. Les Oiseaux, d’Hitchcock, et Les Chiens de paille, de Peckinpah, vraiment ? My Fair Lady avec Keira Knightley à la place d’Audrey Hepburn ? Le Yellow Submarine des Beatles en 3D par Robert Zemeckis ? Suspiria, de Dario Argento, américanisé ? La liste est très longue, et l’on pourrait penser que le manque d’imagination à Hollywood touche à son comble. Selon le Los Angeles Times, « si l’on en croit le déluge de projets ayant le feu vert et adaptés de séries et de vieux (et pas si vieux) films, l’industrie du cinéma et de la télévision est obsédée par la perspective de revivre son passé ». Prenons un peu de recul. Tout cela est-il si nouveau ? Au début de la décennie précédente, devant l’arrivée de films comme La Vérité sur Charlie, affligeante version du délicieux Charade, Variety s’interrogeait déjà : « S’appuyer sur des titres familiers est-il malsain sur le plan créatif ? La prolifération de remakes de films révérés devient une banalité. » C’est vrai, les années 2000 ont pillé allégrement le patrimoine cinématographique – parfois avec ambition (le remake du légendaire King Kong), souvent avec frénésie (les innombrables réinterprétations de films d’horreur asiatiques). Mais se souvient-on que, dans les années 80, la mode était aux remakes de films français comme La Totale, Trois hommes et un couffin, La Cage aux folles, Boudu sauvé des eaux, Cousin, cousine, A bout de souffle ou Un éléphant ça trompe énormément ? On peut remonter plus loin. Des classiques comme Le Faucon maltais, Ben Hur, Scaramouche, Une place au soleil, Mogambo ou Mirage de la vie sont tous des remakes, et des réalisateurs comme Raoul Walsh, Howard Hawks, Leo McCarey ou Alfred Hitchcock ont même signé des reprises de leurs propres films ! La réalité, c’est que la politique des remakes est inhérente à l’industrie hollywoodienne. Et pour un remake atroce comme Poséidon, il y en aura toujours un qui sauvera la mise : la version d’Ocean’s Eleven signée Soderbergh est bien meilleure que l’originale. Et que dire de l’adaptation d’Inglourious Basterds par Tarantino ?
Une prise de risque minimale…
Hollywood ne manque pas d’idées. Il est simplement plus facile, rapide et moins coûteux de racheter les droits d’un vieux film (ou d’un film étranger) que de lancer un nouveau projet. Les studios ont des catalogues énormes de films dans lequel ils peuvent plonger illico. Une formule qui a déjà marché est une quasi garantie de succès – d’où les trois versions d’Une étoile est née (une quatrième est en chantier). Et puis la familiarité de certains titres rassure le public. Economiquement, un remake est, à l’instar des suites (l’autre grande tendance qui sévit à Hollywood), beaucoup plus sûr qu’un projet original. Selon Variety : « Les remakes réduisent les risques. » Pratiquement tous les films d’horreur de ces dernières années, d’Halloween à La Dernière Maison sur la gauche en passant par La colline a des yeux, sont des remakes, peu chers et très rentables. Il y a deux filons pour ces reproductions. Les films américains, tout d’abord. De plus en plus de réalisations, pas si anciennes, sont remises sur le tapis car les récents progrès technologiques permettent de renouveler spectaculairement certains concepts : c’est le cas du Choc des Titans et de projets tels Le Voyage fantastique, Conan le barbare, Poltergeist, The Crow ou Total Recall. Il y a, par ailleurs, les films étrangers. En ce moment, Hollywood rachète essentiellement des comédies (La Première Etoile) ou des films à suspense (Morse, Millénium, le film, Ne le dis à personne). Le grand public américain connaît peu ces films et les accueillera donc comme des productions originales, les changements apportés ne les dérangeront pas, et le reste du monde suivra. Pour un studio, la proposition est irrésistible. Ce qui est nouveau, en revanche, c’est que de plus en plus de réalisateurs applaudis veulent aujourd’hui faire des remakes. Quand les frères Coen revisitent Cent dollars pour un shérif, Bryan Singer, Excalibur, Michel Gondry, Le Frelon vert ou Todd Haynes, Le Roman de Mildred Pierce, la notion de remake devient soudain excitante…